Willard Wigan est un artiste renommé, nommé par la Reine Elizabeth II en 2007 “Membre de l’Ordre de l’Empire britannique pour services rendus aux Arts”. Mais la pratique artistique de Wigan est très particulière: c’est un microsculpteur. Son art, il le pratique dans le chas d’une aiguille ou sur la tête d’une épingle. Pour parvenir à sculpter des oeuvres mesurant quelques micro millimètres (moins de 1/13e d’un grain de riz!) il travaille à l’aide d’un scalpel et d’un microscope, utilise des pattes de mouche comme pinceau, emploie des matériaux bizarres comme de la toile d’araignée qu’il mélange à de l’or ou du kevlar...
Cette discipline artistique extrême se double d’une discipline physique: pour parvenir à créer ses micro sculptures, Wigan a appris à contrôler et ralentir sa respiration, entrant quasiment en transe afin de parvenir à sculpter entre deux battements de son coeur. Le résultat, saisissant, ne peut pourtant pas s’apprécier à l’oeil nu. C’est sous le microscope que l’on découvre un groupe de chameaux arpentant le chas d’une aiguille, le skyline de Manhattan ou des reproductions du David de Michel-Ange, de la Cène de Léonard de Vinci, voire un portrait en pied du Prince Charles ou de Mike Tyson...
Quand Robert Greubel et Stephen Forsey ont découvert son existence, il y a 5 ans, ils se sont tout de suite dit qu’une rencontre entre ce scultpeur du microscopique et leur propre pratique de la mécanique microscopique pourrait donner lieu à une oeuvre commune. Une oeuvre dans laquelle art et horlogerie se rencontreraient sur le terrain commun de l’extrêmement petit, une co-création en d’autres mots. Le mot “co-création” est parfaitement adapté car l’insertion complexe d’une micro sculpture dans une pièce d’horlogerie a demandé des modifications architecturales et techniques nécessitant recherche et innovation. Le résultat, qui porte le nom de Art Piece 1 est à découvrir au SIHH 2013. Mais auparavant, il a déjà été présenté, dans divers stades de réalisation, lors de la Foire Internationale d’Art Contemporain de Paris, la fameuse FIAC, ainsi qu’à la Contemporary Art Fair de Shanghai. On y découvre un micro masque peint, enchâssé à l’intérieur de la couronne mais qui reste visible grâce à un système optique.
Shanghai, précisément, où Greubel Forsey a récemment inauguré une boutique d’un nouveau genre, la Time Art GalleryGF , sise au prestigieux Bund 18. Comme son nom l’indique, cette galerie cherche à lancer des ponts entre art et horlogerie. On y retrouve bien évidemment la collection des garde-temps Greubel Forsey mais aussi, côté horlogerie, des pièces exceptionnelles d’horlogers comme Philippe Dufour ou Vianney Halter, qui témoignent de façon diverse de l’art horloger, que ce soit en termes de finitions spectaculaires ou d’architecture étonnante. Mais cette galerie d’un nouveau type permet aussi à Greubel Forsey d’exposer des artistes contemporains et, en l’occurrence, leur première co-création avec Willard Wigan. Une façon de montrer concrètement qu’art et horlogerie peuvent parfaitement dialoguer.
Source: Europa Star Première Vol.14, No 6 Voir les autres articles dans le dossier spécial Art & Horlogerie:
- Introduction
- La voie culturelle – Entretien avec Franco Cologni
- Rolex - Renouer avec la transmission
- Girard-Perregaux - En hommage à Le Corbusier
- Breguet - Mécénat culturel : la manne miraculeuse
- Vacheron Constantin - Faire dialoguer art et artisanat
- Hermès - Temps imaginaires
- MB&F - “Dans l’horlogerie, il n’y a pas assez d’égoïstes”