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Blancpain, à côté de l’usine, la ferme

April 2013


En 2002, quand Marc Hayek, petit-fils de Nicolas Hayek, est nommé à la tête de Blancpain (depuis, il chapeaute également Breguet et Jaquet-Droz), la marque, relancée par Jean-Claude Biver et Frédéric Piguet en 1982, produisait quelques 3’000 montres. Aujourd’hui, un peu plus de dix ans plus tard, Blancpain “dépasse les 20’000 montres“, emploie près de 700 personnes en Suisse pour un chiffre d’affaires que l’on peut estimer à un peu plus de 300 millions (chiffres non officiels, sachant que les trois marques Breguet, Blancpain et Jaquet Droz”ont frôlé le milliard de CHF de ventes en 2012, Breguet représentant plus de la moitié").

Depuis 2010 et l’intégration complète du fabricant de mouvements Frédéric Piguet, la manufacture Blancpain, verticalisée pour l’essentiel, employant désormais 600 collaborateurs, est installée sur deux sites de production aux caractères fort différents mais parfaitement complémentaires. Le pôle industriel regroupe désormais à lui seul 500 personnes dans un bâtiment du Sentier (Vallée de Joux) Il s’y produit la grande majorité des composants de ses propres mouvements (“exclusivement mécaniques depuis 1735”, comme le proclamait le slogan provocateur inventé par Jean-Claude Biver en pleine suite et fin de la crise du quartz.) Depuis la récente complète intégration de Piguet, Blancpain, dont les propres mouvements équipent 100% de sa production, travaille en exclusivité pour elle-même.

Non loin de là, au Brassus, le pôle horlogerie compliquée est quant à lui installé dans une ferme historique. Là, une cinquantaine d’horlogers accomplis et d’artisans d’art travaillent aux pièces les plus élaborées de la marque dans un climat qui ressuscite l’ambiance paisible de l’horlogerie à l’ancienne. La “Ferme”, à la chaleureuse atmosphère boisée, est divisée en silencieux ateliers spécialisés. Atelier de décoration, au travail accompli à l’ancienne et à la main, procédant à l’anglage, aux traits tirés, au poli miroir, au perlage, aux Côtes de Genève. Atelier de gravure, à l’excellence reconnue et où officie, ruban bleu-blanc-rouge au col, la Meilleure Ouvrière de France. Dans les étages de la “ferme”, les ateliers se partagent par types de complications. Ici, tourbillon, carrousel, équation marchante, quantième perpétuel, là répétition minutes.

CHRONOGRAPH LARGE DATE de Blancpain
CHRONOGRAPH LARGE DATE de Blancpain

Mais derrière la carte postale, la “ferme” est aussi un laboratoire des complications. Blancpain a ainsi régulièrement frappé les esprits avec des réalisations marquantes, pour certaines, tout à fait originales voire véritablement novatrices, à l’image de la récente Villeret Calendrier chinois traditionnel. Une première qui, outre le calendrier grégorien, présente en parallèle le calendrier chinois traditionnel qui se base sur le cycle lunaire de 29,5 jours. Un très complexe calendrier qui comporte une indication de l’heure-double, des signes du zodiaque, du quantième et des mois chinois, ainsi que les indications des cinq éléments, des troncs célestes et des mois intercalaires. La profonde complexité de ce mouvement tient essentiellement à l’irrégularité des différents cycles, une irrégularité qui entraîne l’ajout ponctuel d’un mois intercalaire, l’année lunaire étant plus courte que l’année solaire mais devenant plus longue lorsque ce mois intercalaire est ajouté! Bref, un casse-tête mathématique qu’il a fallu longuement (5 ans) transposer en rouages, cames, leviers… Soit 434 composants, qu’il a fallu ensuite angler, polir, graver… pour cette première qui devait impérativement être prête à l’heure de l’Année du Dragon.

Autre fait marquant, toujours dans le domaine des complications: la réhabilitation par Blancpain du carrousel, un mécanisme horloger aux effets comparables à ceux du tourbillon (la compensation des effets de la gravitation), mais qui a longtemps été éclipsé par celui-ci, notamment à cause de la complexité de son montage et de son réglage. En réintroduisant ce mécanisme oublié (avec l’aide de l’horloger Vincent Calabrese) et en le couplant avec d’autres complications, telles que la répétition minutes, Blancpain a ouvert, quasiment ex nihilo, une nouvelle catégorie de garde-temps.

Si ces pièces de haute complication portent très haut l’étendard de la marque, elles ne constituent, de toute évidence, qu’une fraction de la production totale de Blancpain. Mais elles s’en font l’ambassadeur auprès d’une clientèle privilégiant, pour l’essentiel, ses collections les plus traditionnellement horlogères. En effet, parmi les 5 principales lignes de produits offerts par Blancpain, c’est la ligne classique Villeret (du nom du lieu de naissance de la marque, en 1735) qui remporte le plus de suffrages. Les autres lignes majeures étant, outre la ligne des complications Brassus, la célèbre ligne de montres de plongée Fifty Fathoms, la ligne sportive L-Evolution, et la ligne Women.

A Bâle, il faut, semble-t-il, s’attendre à des nouveautés dans chacune de ces familles.

Source: Europa Star Première Vol. 15, No. 2