Sur dix ans, la Chine va graduellement réduire de 60% la taxe d’importation sur les montres suisses (entre autres), de 18% la première année et 5% les neuf années suivantes. Coup dur pour la compétitivité de Hong Kong, premier marché de l’horlogerie suisse et dont 90% de la clientèle est chinoise? Réponse avec Geoffrey Kao, président de la fédération horlogère de Hong Kong.
Europa Star: A court terme, cet accord de libre-échange ne risque-t-il pas de porter préjudice au commerce de montres à Hong Kong qui est, rappelons-le, de très loin le premier marché de l’horlogerie suisse?
Geoffrey Kao: D’une part, précisons que la taxe d’importation sera progressivement réduite, mais pas totalement abrogée et, d’autre part, la Chine conservera les 17% de taxe de consommation – donc à terme, il subsistera toujours au moins cette différence de prix entre Hong Kong et la RPC.
Pourtant, certaines marques horlogères veulent unifier les prix en vitrine entre les deux zones, le groupe LVMH l’a même promis!
Leur idée est en réalité d’augmenter les prix à Hong Kong et de les abaisser en Chine continentale, mais avec quelles conséquences? Pour moi, outre l’avantage du prix, Hong Kong offre trois grands d’avantages. Le premier est le choix car, nulle part ailleurs, on ne trouve une telle concentration de marques internationales. Le deuxième est la qualité car les compétences et la sélection des produits sont d’un niveau unique au monde. Et le troisième est la sécurité car acheter à Hong Kong, c’est l’assurance d’une pleine garantie et une indiscutable authenticité. En outre, Hong Kong est une ville extraordinaire et un hub en Asie pour rejoindre toutes les destinations du globe et à ce titre, elle restera toujours une escale de choix. Je ne crois pas que la réduction de la taxe d’importation en Chine affectera Hong Kong en tant que paradis du shopping.
“Nulle part ailleurs, on ne trouve une telle concentration de marques internationales. ”
Les puissants groupes horlogers pourraient développer leur propres réseaux de vente en Chine – Swatch vient de le faire en Inde – avec, a-t-on dit à la foire horlogère de Shenzhen, un avantage de prix au détail jusqu’à 35% par rapport aux réseaux de vente chinois. Qu’en pensez-vous?
Les charges opérationnelles et de structure sont les plus coûteux et je ne crois pas un instant qu’ils puissent parvenir à être 35% meilleur marché.
Pour parvenir à vendre au même prix qu’à Hong Kong, les marques devraient absorber elles-mêmes les 17% de taxe, et croyez-moi, ce coût serait extrêmement lourd.
Mais dans dix ans, si l’écart de prix entre Hong Kong et la RPC n’est plus que de 17% et que, en plus, les grands groupes horlogers compriment les prix en Chine via leurs propres réseaux...
...Comment peuvent-ils vendre moins cher? En analysant le cours des actions des chaînes de revendeurs, on s’aperçoit qu’elles sont peu profitables voire déficitaires. Pour parvenir à vendre au même prix qu’à Hong Kong, les marques devraient absorber elles-mêmes les 17% de taxe, et croyez-moi, ce coût serait extrêmement lourd.
Dans la balance, vous oubliez les prix astronomiques du mètre carré à Hong Kong, poussant certains distributeurs locaux à ouvrir des boutiques à Shanghai ou Pékin…
Certes, le prix de l’immobilier à Shanghai est loin d’atteindre celui de Hong Kong, mais ce qui compte, c’est le retour sur investissement par mètre carré. Et là, Hong Kong devient très profitable car on y réalise beaucoup de ventes au mètre carré investi! Alors que souvent, en Chine, les boutiques font figure de simples vitrines...
“Le prix de l’immobilier à Shanghai est loin d’atteindre celui de Hong Kong, mais ce qui compte, c’est le retour sur investissement par mètre carré.”
Source: Europa Star October - November 2014 Magazine Issue